La mutuelle santé est-elle obligatoire en France ?
Contrairement à une idée reçue, la mutuelle santé n'est pas obligatoire pour tous les français. L'obligation ne concerne que les salariés du secteur privé dans le cadre de la mutuelle d'entreprise, mise en place depuis la généralisation de la complémentaire santé collective en 2016.
Pour les autres catégories de population (travailleurs indépendants, fonctionnaires, retraités, étudiants ou demandeurs d'emploi), aucune obligation légale n'impose de souscrire une mutuelle santé. Ils peuvent tout à fait choisir de ne compter que sur les remboursements de la sécurité sociale.
Cette liberté de choix explique pourquoi environ 5% de la population française, soit près de 3 millions de personnes, n'ont pas de complémentaire santé selon les dernières études de la DREES.
Peut-on refuser d'adhérer à la mutuelle d'entreprise obligatoire ?
Le principe de l'obligation d'affiliation à la mutuelle d'entreprise
Depuis le 1er janvier 2016, tous les employeurs du secteur privé ont l'obligation de proposer une complémentaire santé collective à leurs salariés. Cette mutuelle d'entreprise doit respecter un socle de garanties minimales et être financée au moins à 50% par l'employeur.
En principe, tous les salariés doivent y adhérer, sauf cas de dispense spécifiques. L'objectif de cette mesure était d'améliorer l'accès aux soins et de réduire les inégalités de couverture santé entre les salariés.
Quels sont les cas de dispense de mutuelle obligatoire ?
Il est possible de refuser la mutuelle d'entreprise dans certaines situations précises :
- couverture par une autre mutuelle : conjoint bénéficiant d'une mutuelle familiale, mutuelle étudiante pour les apprentis, etc. ;
- contrat à durée déterminée ou mission d'intérim de moins de 3 mois ;
- temps partiel ou apprentissage dès lors que la cotisation à la charge du salarié représente 10 % ou plus de son salaire ;
- bénéficiaire de la Complémentaire Santé Solidaire (CSS) ;
- contrat de professionnalisation ou d'apprentissage sous certaines conditions.
L'employeur ne peut pas refuser une demande de dispense si elle est justifiée par l'un des motifs légaux.
Quels sont les risques de ne pas prendre de mutuelle ?
Le reste à charge sur les soins courants
Sans mutuelle, vous devrez assumer le ticket modérateur et les dépassements d'honoraires.
Pour une consultation chez un médecin généraliste à 30 euros, la sécurité sociale rembourse 19 euros après déduction de la participation forfaitaire de 2 euros. Il reste donc 11 euros à votre charge pour chaque consultation.
Pour les médicaments, les taux de remboursement varient de 15% à 100% selon leur service médical rendu. Les médicaments à vignette bleue ne sont remboursés qu'à 30%, laissant 70% des frais à la charge du patient.
Que faire en cas d'hospitalisation sans mutuelle ?
L'hospitalisation représente le risque financier le plus important en l'absence de mutuelle. Plusieurs frais restent à votre charge :
- le forfait journalier hospitalier : 20 euros par jour en hôpital et 15 euros par jour en psychiatrie ;
- les dépassements d'honoraires des chirurgiens et anesthésistes, non remboursés par la sécurité sociale ;
- la chambre particulière si vous la souhaitez, intégralement à votre charge ;
- certains dispositifs médicaux non pris en charge au tarif de base.
Une intervention chirurgicale peut ainsi générer plusieurs milliers d'euros de reste à charge, même dans le secteur public. Et il n'est pas toujours possible de souscrire une mutuelle en cours d'hospitalisation pour faire face à ces dépenses imprévues.
L'impact sur les soins dentaires et l'optique
Les soins dentaires et l'optique font partie des postes de dépenses où le remboursement par la sécurité sociale est souvent insuffisant, même avec le dispositif 100 % Santé.
Pour les soins dentaires, une couronne dentaire coûte en moyenne autour de 600 euros. Avec le 100 % Santé, certaines couronnes peuvent être prises en charge sans reste à charge. Mais pour les couronnes hors panier 100 % Santé, le remboursement par l’Assurance maladie reste faible, généralement autour de 120 euros. Sans mutuelle, le patient doit donc assumer une part très importante du coût, souvent plusieurs centaines d’euros.
Pour les lunettes, le dispositif 100 % Santé garantit une prise en charge intégrale de certains montures et verres répondant à des critères spécifiques. Toutefois, pour une paire de lunettes coûtant 300 euros hors panier 100 % Santé, le remboursement de la Sécurité sociale ne dépasse pas environ 30 euros, laissant un reste à charge élevé pour le patient qui n’a pas de complémentaire santé.
Est-il possible de se soigner sans mutuelle ?
Les remboursements de la sécurité sociale seule
La sécurité sociale assure une couverture de base qui permet de se soigner, mais avec des limitations importantes. Les taux de remboursement varient selon les actes :
- Consultations médicales : 70% du tarif de base (moins 2 euros de participation forfaitaire)
- Analyses et examens : 60% à 100% selon le type
- Hospitalisation : 80% des frais (100% en ALD)
- Médicaments : 15%, 30%, 65% ou 100% selon la vignette
Cette couverture permet de faire face aux soins essentiels. Mais elle génère des restes à charge significatifs pour les soins spécialisés.
La Complémentaire Santé Solidaire (CSS) comme alternative
Pour les personnes aux revenus modestes, la Complémentaire Santé Solidaire constitue une excellente alternative à une mutuelle privée. Elle est :
- gratuite pour les revenus inférieurs à 10 339 euros par an pour une personne seule ;
- à contribution réduite (moins d'1 euro par jour) pour les revenus compris entre 11 482 et 15 973 euros par an
La CSS offre une prise en charge complète sans avance de frais et couvre la plupart des soins, y compris dentaires et optiques.
Le cas particulier des ALD (Affections Longue Durée)
Si vous souffrez d'une Affection Longue Durée reconnue par l'Assurance maladie, les soins directement liés à votre pathologie sont remboursés à 100% par la sécurité sociale. Cette prise en charge concerne une trentaine de maladies chroniques comme le diabète, l'hypertension artérielle ou les cancers.
Cependant, cette exonération du ticket modérateur ne couvre que les traitements spécifiques à l'ALD. Les autres soins restent remboursés aux taux habituels, ce qui peut justifier le maintien d'une complémentaire santé même en cas d'ALD.
Pourquoi ne pas prendre de mutuelle : calcul économique
Pour qui cela peut-il être rentable ?
Ne pas prendre de mutuelle peut être économiquement avantageux pour certains profils spécifiques :
- jeunes en excellente santé avec peu de consultations médicales ;
- personnes aux revenus très élevés capables d'assumer des frais de santé importants ;
- bénéficiaires de la CSS qui ont déjà une couverture complète ;
- personnes en ALD avec des besoins de santé très spécifiques et prévisibles.
Pour un profil jeune et en bonne santé, les dépenses annuelles peuvent se limiter à quelques centaines d'euros (consultations occasionnelles, médicaments, examens préventifs), soit un montant inférieur au coût d'une mutuelle.
L'épargne de précaution comme stratégie alternative
Plutôt que de payer une cotisation de mutuelle, certaines personnes choisissent de constituer une épargne de précaution dédiée aux frais de santé. Cette stratégie nécessite une discipline financière rigoureuse et un capital de départ suffisant.
L'avantage de cette approche est que l'argent non dépensé reste acquis, contrairement aux cotisations de mutuelle. Cependant, elle expose à un risque en cas de gros soucis de santé dans les premières années, avant que l'épargne ait eu le temps de se constituer.
Les alternatives à la mutuelle santé classique
Choisir une garantie hospitalisation seule
Pour ceux qui souhaitent se protéger contre le risque le plus coûteux sans souscrire une mutuelle complète, la garantie hospitalisation constitue une alternative intéressante. Ces contrats spécialisés couvrent uniquement les frais liés aux hospitalisations :
- Forfait journalier hospitalier
- Dépassements d'honoraires chirurgicaux
- Chambre particulière
- Frais d'accompagnement
Avec des tarifs plus bas qu'une mutuelle complète, cette solution permet de sécuriser l'essentiel tout en gardant un budget maîtrisé.
Opter pour une assurance santé à la carte
Certains assureurs proposent des formules modulaires permettant de ne souscrire que les garanties vraiment utiles. Vous pouvez par exemple choisir une couverture uniquement pour :
- l'optique (si vous portez des lunettes) ;
- les soins dentaires (si vous avez des besoins spécifiques) ;
- les médecines douces (si vous y avez régulièrement recours).
Cette approche sur-mesure permet d'optimiser le rapport qualité-prix en ne payant que pour les risques qui vous concernent réellement.